Champignons hallucinogènes, vers une pratique thérapeutique ?

Agent de communication avec le divin ou promesse d’un long voyage psychédélique, le champignon hallucinogène est en voie d’être légalisé dans certains pays. En effet, sa réputation de “drogue dure”, autrefois consommée dans le fin fond de l’Amazonie sous les auspices d’un chaman douteux, est en train d’être revisitée. Aujourd’hui, les potentielles propriétés thérapeutiques du champignon hallucinogène attirent même l’attention de la communauté scientifique.

Le champignon hallucinogène, une pratique ancestrale

Les champignons hallucinogènes se consomment crus et c’est assez mauvais. Ils se mangent au cours d’une cérémonie encadrée par un chaman compétent. Enfin, en théorie. Selon les témoignages, leurs consommateurs peuvent vivre une expérience soit transcendante, soit terrifiante. Visions colorées, crises d’hilarité, communications supposées avec le divin ou visions effrayantes, les effets diffèrent. Aujourd’hui, au-delà du trip récréatif pour les plus chanceux, on attribue aux champignons hallucinogènes des vertus thérapeutiques. Depuis les années 50, la communauté scientifique se penche effectivement sur ce point-là. Mais nous n’avons rien inventé. En réalité, les champignons sont davantage une redécouverte de pratiques ancestrales qu’une nouvelle découverte qui bouscule le champ des possibles.

Pierres de champignons, personnages Aztèques

Les premières utilisations des champignons hallucinogènes remontent aux civilisations aztèques et mayas, principalement en Amérique Centrale et du Sud. De nombreux artefacts et sculptures ont été retrouvés dans ces régions, jadis terres des peuples amérindiens. Au Mexique, chez les Aztèques, les “pierres champignons” datées de -1000 à -500 avant J.-C. représentent de petits personnages dansants, coiffés de chapeaux champignons. Ils symbolisent l’état de transe associé à leurs effets. Au contraire chez les Mayas, c’est Xochipilli, le prince des fleurs, qui était vénéré. Cette divinité était considérée comme le patron des rêves fleuris, une manière poétique pour dire qu’on se prend une bonne perche. Toutefois, pour ces deux peuples, les champignons hallucinogènes permettaient de prédire l’avenir ou de soigner des maladies. L’arrivée des colons espagnols a entraîné l’interdiction de ces pratiques sous la bannière de la foi catholique. Les champignons sont alors dénoncés comme étant des éléments contraires aux enseignements chrétiens. 

Les hippies et les champis

Longtemps oublié, le champignon hallucinogène est redécouvert dans les années 1950 par le banquier Robert Gordon Wasson. Lors d’une visite au Mexique avec son épouse, le couple participe à plusieurs cérémonies chamaniques impliquant la consommation de champignons. Leur expérience, largement médiatisée, déclenche un regain d’intérêt en Occident pour ces substances. Des rapports qui suscitent également l’intérêt des laboratoires pharmaceutiques. Les principaux agents psychoactifs des champignons magiques sont minutieusement étudiés. Les laboratoires commencent alors à les reproduire par synthèse. Les coquins.

Marina Sabina, célèbre chaman zapotèque

Dans les années 1960, les chercheurs Timothy Leary et Richard Alpert mènent des études sur l’utilisation des champignons hallucinogènes à des fins d’exploration psychologique et spirituelle. Cependant, ces substances présentent un risque d’abus et d’addiction. Illégaux mais populaires, notamment aux États-Unis, ils sont également accusés d’attiser les idéaux révolutionnaires des mouvements contre-culturels de l’époque. Oui, les hippies en ont bien profité. Leur utilisation sera ensuite officiellement interdite dans de nombreux pays.

Vertus thérapeutiques et légalisation des champignons hallucinogènes

Au fil des années, le champignon gagne la réputation d’offrir certaines vertus thérapeutiques. Un certain type de tourisme se développe d’ailleurs en Amérique Latine pour vivre le fameux voyage psychédélique. Dans le même temps, certains pays européens s’ouvrent de plus en plus à la discussion sur ce sujet comme en atteste ce témoignage publié par Julien Blanc-Gras en janvier 2024 dans le magazine le Monde. 

En voici un extrait :
Paul McCartney est en train de m’expliquer la structure de l’Univers , il y a sept niveaux ” affirme le consommateur avec un œil pétillant.” Nous rions de bon cœur devant cette révélation de pacotille, puis je m’approche pour lui chuchoter à l’oreille, le plus sérieusement du monde : Mec, tu t’es trompé. En vérité, il y en a neuf “.

La thérapie du champignon hallucinogène


En réalité, lors des dernières décennies, l’intérêt de la communauté scientifique pour les champignons hallucinogènes n’a cessé de croître. Selon de nouvelles études, leur potentiel thérapeutique est bien réel. Ils sont actuellement explorés pour traiter des troubles tels que la dépression résistante aux traitements, le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et l’anxiété existentielle chez les patients en phase terminale. Et apparemment, l’idée plaît. Outre les Pays-Bas, dont la tradition libérale en matière de stupéfiants est bien établie, l’Australie a légalisé la psilocybine, soit la substance extraite du champignon, en 2023, pour des usages médicaux. La Suisse, le Canada, Israël et l’État de l’Oregon (États-Unis) l’autorisent à titre exceptionnel

Les champignons hallucinogènes représentent aujourd’hui une intersection entre l’histoire culturelle, la spiritualité et la science moderne. La recherche continue sur leurs effets pourrait élargir notre compréhension de la conscience ou offrir de nouveaux traitements médicaux. Mais calmons-nous. Pour l’heure, la marijuana et le CBD restent en tête de liste en matière de substances thérapeutiques autorisées dans le monde.

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