Ils ont parfois l’air innocent, souvent appétissant et toujours bon marché. Mais la science commence à le démontrer : les aliments ultra-transformés ont un impact sur la santé. Ils seraient directement liés à un risque accru de maladies cardiovasculaires, de diabète, de cancer, et de dépression. La totale. Et pour les épidémiologistes, désormais, il n’y a plus de dose inoffensive.
L’intuition de Carlos Monteiro
Crème chocolatée, biscuits, jus de fruits, cela fait longtemps que les aliments ultra-transformés ont pris d’assaut les rayons des supermarchés. En France, ils représentent presque un tiers des apports alimentaires. Une proportion qui monte jusqu’à 80% aux États-Unis. Lorsque l’on évoque les produits ultra-transformés, on cible les aliments qui sont préparés non pas à base de produits bruts ou d’ingrédients culinaires type farine, sucre ou huile, mais à base d’ingrédients eux-mêmes transformés. Et selon les marques, les produits sont plus ou moins “ultra”. Prenons l’exemple du jambon en supermarché. Pour un même produit, en fonction de la marque, il peut contenir entre 0 et 15 additifs comme le nitrite par exemple. Plus il y a d’additifs, plus le produit est considéré comme transformé.
Depuis plusieurs années on se doutait que sous leurs airs innocents et bien pratiques, ils n’étaient pas toujours très sains. Mais l’impact sur la santé semble aujourd’hui dépasser toutes les estimations. En 2009, le nutritionniste Carlos Monteiro s’alarme. Pour lui, au-delà d’être trop sucré, trop gras ou trop salé, l’impact d’un aliment sur la santé dépendrait aussi du degré de sa transformation. En conséquent, l’expansion des produits ultra-transformés dans les rayons expliquerait une bonne partie de l’épidémie d’obésité mondiale qui semble s’accélérer. Grâce à lui, c’est toute la communauté scientifique qui s’est penchée sur la question.
Effet des aliments ultra-transformés sur la santé : la communauté scientifique s’alarme
En quelques années, les études sur l’impact des aliments ultra-transformés se sont multipliées. Un lien est pour la première fois établi entre les maladies cardiovasculaires et la consommation d’émulsifiants. Quelques mois plus tard, une revue parapluie qui synthétise les résultats de nombreuses études portant sur un total de 10 millions de personnes dresse la première vue d’ensemble du phénomène. La conclusion est claire : l’alimentation ultra-transformée augmente l’incidence et la prévalence de presque toutes les maladies considérées. Cancer, diabète jusqu’à la dépression, l’équipe internationale d’experts en épidémiologie nutritionnelle a identifié en tout 32 domaines de santé affectés. Parmi ce flux de recherches, la bête noire des aliments ultra-transformés reste les crèmes dessert et les sauces. Effectivement, pour obtenir leur texture crémeuse on y ajoute tas d’additifs qui leur permettent de trouver un semblant de structure.
Pour certains chercheurs, les aliments ultra-transformés s’apparentent plus à des formulations chimiques qu’à de la nourriture. En conséquence leur digestion sont altérées. Pour aider les consommateurs à identifier ces produits, un étiquetage à été proposé. Une nouvelle version de Nutriscore entouré d’un bandeau noir pour indiquer les aliments ultra-transformés devait devenir obligatoire en Europe. Le label aurait dû être voté par la Commission européenne en 2022, mais a été reporté face à la levée de boucliers de l’industrie alimentaire. Il y a également l’arme du prix via une politique de taxation sur les aliments ultra-transformés. Toutefois au vu du chiffre d’affaires en jeu, 1200 milliards d’euros pour les 25 plus grosses sociétés mondiales en 2020, ce n’est pas gagné.
Vous voyez cette petite voix qui nous dit “non, ne touche pas à ce pot de Nutella” ou “ralentis avec le Coca” lorsque l’on sillonne les rayons du supermarché ? Ces petits plaisirs coupables semblent aujourd’hui devenir de vrais sujets de santé. À terme, si les prix des produits sains et bio deviennent abordables pour tout le monde, peut-être que la lutte contre les produits ultratransformés pourrait devenir un vrai combat à mener à la loyale. Affaire à suivre.