Quelles sont les enceintes de Paris ?

Paris, la Ville Lumière, a vu son histoire façonnée par des murs qui, pierre après pierre, ont raconté son évolution. Les enceintes qui ont entouré Paris ne sont pas de simples fortifications, mais des témoins des défis, des ambitions et parfois des absurdités de leur époque. Partons à la découverte de ces murailles, des enceintes gallo-romaines et carolingiennes au mur des Fermiers généraux, en passant par celles de Philippe Auguste et de Charles V.

Aux origines de Paris : des enceintes gallo-romaines et carolingiennes

Au IVe siècle, Lutèce se replie sur elle-même pour devenir Paris. L’enceinte gallo-romaine, construite sur l’île de la Cité, est la première protection tangible de la ville. À cette époque, les Parisiens fuient les menaces barbares et abandonnent les zones non défendables. Cette muraille, épaissie et haute de plusieurs mètres, encercle la partie habitée de l’île, formant un véritable cocon défensif. Les ponts qui permettent d’accéder à la ville, le Grand Pont et le Petit Pont, sont protégés par des tours. On raconte même que l’une d’elles aurait été renforcée sur ordre de Charles le Chauve, ajoutant une couche d’histoire royale à cet édifice.

La Seine elle-même jouait un rôle de défense naturelle. Mais lors de crues importantes, certaines parties de l’enceinte devenaient inaccessibles, transformant Paris en une île imprenable… et impraticable. Malgré sa robustesse, l’enceinte gallo-romaine disparut au fil des siècles, mais des fragments subsistent. Vous pouvez les admirer rue de la Colombe ou encore dans la crypte archéologique du parvis Notre-Dame.

Au IXe siècle, face à l’assaut des Vikings, Paris connaît une nouvelle urgence défensive. L’enceinte carolingienne est construite, mais cette fois sur la rive droite. Curieusement, elle ne recouvre pas tout Paris et semble plutôt partielle. Les églises deviennent des bastions : Saint-Merri, Saint-Gervais, et Saint-Germain-l’Auxerrois jouent le rôle de repères dans cette architecture défensive. En 885, lors du siège des Vikings, ces fortifications montrent leur efficacité : les envahisseurs pillent, mais la ville ne tombe pas. Ironie de l’histoire, ces murs finirent eux aussi par être oubliés, redécouverts seulement grâce aux fouilles archéologiques du XXe siècle.

Superposition des principales enceinte de Paris après l'époque gallo-romaine - César Culture G
Superposition des principales enceintes de Paris après l’époque gallo-romaine – Wikipédia

Philippe Auguste et Charles V : les murailles qui transforment Paris

Au Moyen Âge, les enceintes de Paris atteignent une nouvelle dimension avec Philippe Auguste. Conscient des menaces extérieures (notamment des Anglais), ce roi visionnaire entreprend en 1190 la construction d’une muraille qui va ceinturer les deux rives. Pour la première fois, Paris est unifié, consolidé et prêt à prospérer. Longue de 5 100 mètres, l’enceinte se flanque de 77 tours espacées de 60 mètres.

Chaque tour contenait une pièce réservée à des guetteurs, mais aussi un espace où les oiseaux s’élevaient pour signaler d’éventuelles menaces (les pigeons, bien avant les drones). Sur la rive gauche, cette muraille entourait le Quartier Latin, non pour protéger les étudiants du Moyen Âge, mais surtout pour protéger leurs manuscrits et bibliothèques, considérés comme des trésors de savoir.

Les vestiges de cette enceinte demeurent impressionnants aujourd’hui. Rue des Jardins-Saint-Paul, dans le Marais, un pan de 70 mètres de long comprenant deux tours est encore visible. Une partie de ces murs se trouve aussi intégrée dans les sous-sols du musée du Louvre, datant de l’époque où le Louvre n’était pas encore une résidence royale mais une forteresse défensive.

Deux siècles plus tard, Charles V s’inspire de Philippe Auguste et voit encore plus grand. Entre 1356 et 1383, il fait ériger une nouvelle enceinte, plus imposante, qui englobe le Marais, l’enclos des Templiers et le Palais du Louvre. Cette muraille, renforcée par des fossés remplis d’eau de la Seine, était si large qu’elle pouvait abriter jusqu’à 200 000 habitants. Bien que démantelée à partir du XVIIe siècle, cette enceinte a laissé une empreinte durable sur Paris, notamment dans les tracés des Grands Boulevards actuels.

L'enceinte Philippe Auguste et la forteresse du Louvre (en bas de l'image) faisant office d'entrée dans Paris jusqu'en 1209 - César Culture G.
L’enceinte Philippe Auguste et la forteresse du Louvre (en bas de l’image) faisant office d’entrée dans Paris jusqu’en 1209 – Sortir à Paris

Le mur des Fermiers généraux et l’enceinte de Thiers : nouvelles ambitions, nouvelles enceintes

Alors que la menace extérieure diminue, Paris entre dans une nouvelle ère. En 1784, le mur des Fermiers généraux est construit, non pour défendre la ville, mais pour taxer les marchandises. L’enceinte devient une frontière fiscale, marquant une rupture. Ses 57 barrières étaient conçues dans un style néoclassique, avec des colonnes et des frontons rappelant des temples grecs.

Le mur murant Paris rend Paris murmurant“. C’est avec ce fameux alexandrin que Beaumarchais rapporte l’impopularité du mur des Fermiers Généraux, à l’aube de la Révolution Française. Les Parisiens le voyaient comme un symbole d’injustice, ce qui explique pourquoi il a disparu dès 1860. Cependant, certaines barrières subsistent, témoins silencieux de cette époque comme la rotonde de la Villette ou la barrière du Trône.

Avec l’enceinte de Thiers, construite entre 1841 et 1844, Paris revient à des préoccupations militaires. En 1860, l’enceinte définit les nouvelles limites de la ville de Paris, annexant des communes avoisinantes. Cette fortification massive, composée de 94 bastions et de fossés gigantesques, visait à protéger la capitale contre une invasion étrangère.

Mais son efficacité fut mise à mal en 1870, lorsque les Prussiens contournèrent les défenses. Il est donc progressivement détruit entre 1919 et 1929 pour laisser place à de nouveaux quartiers. L’enceinte de Thiers, bien que largement disparue, a laissé une empreinte durable sur la physionomie de Paris, notamment à travers le tracé des boulevards des Maréchaux et l’emplacement du boulevard Périphérique.

Démolition des pavillons de l'octroi de l'Etoile en 1860 - César Culture G
Démolition des pavillons de l’octroi de l’Etoile en 1860

Toutes les enceintes de Paris raconte une histoire unique, entre stratégie militaire, politique et fiscalité. Ces murs, souvent oubliés, sont pourtant le reflet des époques qu’ils ont traversées. Aujourd’hui, leurs vestiges se font discrets, mais leurs empreintes marquent encore la ville. Ils rappellent que Paris est une cité en perpétuelle transformation.

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