Peut-être que vous lisez ces mots un café ou un thé à la main, voire même, sur les toilettes. La disponibilité d’eau propre paraît si normale en France que la question ne se pose même plus, sauf pour le 101e département français : Mayotte. Depuis plusieurs mois, les Mahorais vivent au rythme des coupures d’eau, pouvant durer plus de 48 heures. Le quotidien se complique, les écoles et hôpitaux fonctionnent mal, les risques sanitaires se multiplient. Comment explique-t-on cette situation ?
Un manque d’eau, plusieurs sources
Si la pénurie actuelle est historique, le manque d’eau sur l’île ne l’est pas. Indéniablement, le changement climatique accélère et aggrave la sécheresse que connaît Mayotte. La saison des pluies se raccourcit, son intensité est moindre. Cependant, les causes de cette crise sont plus anciennes et plus nombreuses.
Mayotte est le territoire français qui connaît la plus forte croissance démographique. Sa population augmente en moyenne 12 fois plus rapidement que sur l’ensemble du territoire français, du fait d’une natalité et d’une immigration particulièrement fortes. Cette pression démographique et la recherche de terres cultivables entraînent une augmentation de la déforestation sur l’île, largement illégale. Néanmoins, ce sont justement ces espaces boisés qui permettent une régénération des nappes phréatiques.
À cela s’ajoute un réseau de distribution fragile et une mauvaise gestion de l’eau. Plus de 35% de l’eau s’échappe du réseau. Ces fuites s’expliquent par de l’usure, mais aussi par un réel manque d’entretien. La Société Mahoraise des Eaux (SMAE) est pointée du doigt pour ce manque d’infrastructures et elle est visée par une enquête pour plusieurs faits dont de la corruption ou du détournement de fonds publics.
Mayotte, l’archipel où les crises se superposent
A la sécheresse s’ajoutent donc des crises structurelles dans le système de gestion d’eau. De plus, cette situation de raréfaction d’eau potable et propre fait naître des risques sanitaires, mais aussi écologiques.
Les cas de gastro-entérite aiguë atteignent des niveaux records, tant en termes de nombre que de gravité, pouvant aller jusqu’à la réanimation. D’autres éventuelles épidémies pourraient survenir. Le choléra, l’hépatite A ou la fièvre typhoïde pourraient émerger dans une zone où la soif se fait pressante, et l’hygiène secondaire.
Par ailleurs, les autorités ont distribuées des millions de bouteilles gratuitement pour pallier l’absence d’eau au robinet. Une consigne est censée être mise en place pour éviter qu’elles se retrouvent dans la nature. Malgré tout, le risque d’un désastre écologique est bien présent, d’autant plus que l’archipel connaît déjà des retards dans la gestion des déchets.
Les explications du manque d’eau à Mayotte sont multiples. Néanmoins, de graves crises humanitaires et écologiques se jouent actuellement, ou bien se profilent à l’horizon. En plus de prendre en charge les factures d’eau des habitants de Mayotte, Elisabeth Borne se rendra sur place prochainement pour tenter de remédier à la situation que traverse le département le plus pauvre de France.